La Taille

By Romain Hall,

 

Une vieille légende raconte que les bienfaits de la taille auraient été découvert grâce à … un âne ! Dans des temps anciens, alors qu’un paysan travaillait ses terres avec un âne, ce dernier décida de se nourrir des sarments de vigne à proximité. Le temps passe, et, arrivé aux vendanges, le vigneron se rend compte que les ceps où l’âne s’était restauré avait produit plus de raisins et surtout de bien meilleures qualités ! Pour la vendange suivante il tailla court tous ses sarments et cette récolte fut prodigieuse, si bien qu’il devint le marchand de vin le plus riche et connu de la région. Gardant son secret pour lui seul, il fut bientôt si occupé qu’il ne trouva plus le temps de prendre de ses ânes et les vendit.

Le curé qui les acheta fut désolé de les voir se jetaient sur ses sarments de vignes lorsqu’il les ramena chez lui. Mais à la vendange suivant, l’ecclésiastique eut une heureuse surprise. Il comprit de suite tous les bienfaits qu’il pouvait retirer d’une taille courte, et il s’empressa de partager l’information avec ses amis vignerons.
Le premier paysan vit alors ses vins concurrencés et il s’enfonça dans la dépression. Les ânes rendirent leurs derniers souffles et l’homme d’église leur fit construire une statue sur la place du village pour rendre hommage à ces pionniers de la viticulture de qualité.
Des variantes de cette légende impliquent directement Saint-Vincent ou Saint-Martin.

Pour en revenir aux faits, la vigne est une liane et non pas un arbre. Cette liane peut développer de très long rameaux et, arriver à la période printanière les bourgeons de l’extrémité débourrent en premier. Ce faisant ils ralentissent et peuvent même empêcher le développement des bourgeons situés plus bas.
Cette spécificité est dû au fait que la vigne sauvage a besoin de grandir très rapidement en forêt, afin de pouvoir atteindre la canopée et le soleil.
La vigne étant donc très vigoureuse, il est nécessaire de la canaliser. En effet, sans taille, elle grandirait beaucoup trop et, au bout de quelques années, la vigne serait devenue très sensible aux maladies, et produiraient des raisins de très médiocre qualité. Enfin elle s’épuiserait et finirait par mourir.

 

Vignes taillés

Vignes taillés

 

Au Domaine des Bernardins nous utilisons la taille en cordon de Royat pour permettre une bonne aération des grappes et ainsi éviter qu’elles ne pourrissent. Cette taille a été théorisé au XIXème siècle à la ferme-école de Royat dans l’Ariège. Elle présente l’avantage de limiter la productivité du cep ce qui permet d’obtenir une récolte de meilleure qualité. C’est une taille qui prend une demi-douzaine d’années à former la vigne avec des bras suffisamment vigoureux, elle se caractérise par le fait d’être une taille courte sur charpente longue.

La taille s’effectue lorsque la vigne rentre en repos végétatif. Entre le moment où la vigne perd ses feuilles, voit sa sève redescendre et le moment du débourrement (apparition des premiers bourgeons).

Le moment de la taille a une influence directe sur la date du débourrement. Au Domaine des Bernardins, nous taillons entre février et mars en fonction des conditions météorologiques.  Au plus on taille tôt, au plus la vigne sera sensible aux gelées. A contrario, une taille trop tardive, lorsque les premiers bourgeons sont apparus va entraîner une diminution des rendements et de la production de bois : une partie de la sève et donc “l’énergie” de la vigne sera perdue dans les sarments que l’on retire pour la taille.

En conclusion, la taille est une opération indispensable à la survie de la vigne et à des raisins de qualité. Elle participe à la qualité du vin au même titre que le cépage, le terroir, ou les méthodes de vinification.